Le 14 février 2004 - Jours de fête

 

Carnet n° 10

Les carnets de voyage

Bonjour à tous !

 
 
 
 

[] La Tabaski
[] Le spectacle des enfants
[] Visites, rencontres et reportages
[] Le parc national de Guembeul

 

Non, il ne s'agit pas de la saint-Valentin…!

La Tabaski est le non wolof pour désigner la fête musulmanne de l'Aïd El Kébir.

 
     
 


Musée de Saint-Louis : peinture à l'huile sur quadriptyque de 5 sur 2,5 mètres.

   
 

 


Daba, une voisine et amie, ne plaisante pas avec la Tabaski. Waou !


En grand nombre, dans et autour
de chaque mosquée, les hommes
viennent prier en habit de fête.

 


C'était quand la dernière fois
que l'on vous a présenté...


... l'animal mort dans votre assiette ?
Côtes de mouton aux oignons
et pommes de terre !

[] La Tabaski : Au Sénégal, il y a en moyenne, quelque chose à célébrer tous les 40 jours. Les couturiers et les coiffeurs sont sollicités de toutes parts et passent souvent les fêtes épuisés de fatigue !
On nous avait prévenu : aucun Sénégalais ne néglige la Tabaski, c'est l'occasion de se retrouver en famille, de visiter ses proches, de demander pardon à ceux que l'on a blessé durant l'année, de faire le bien autour de soi. Sur l'île de Saint-Louis, les marins rentrent de plusieurs mois de mer et alignent leurs pirogues multicolores sur la berge du quartier de Guet N'Dar.

Dans le pays, tout est prévu pour que rien ne vienne empêcher le bon déroulement de la fête : les congés scolaires sont avancés de quelques jours afin de permettre aux filles de se faire coiffer ou de faire coudre leur nouvel habit (quelques fois plusieurs tenues différentes, dont une tenue traditionnelle), et les rues sont remplies de monde jusque tard le soir. Nous avons pu à peine nous frayer un chemin dans la foule au marché du quartier de Sor, la veille de la Tabaski.
Cette fête, connue aussi sous le nom d'Aïd El Kébir, est la plus grande fête du monde musulman (nous avons rectifié notre confusion dans la newsletter n° 6 - deuxième partie - car la fin du ramadan était l'Aïd El Fitr).

Nous avons eu la chance d'être invités dans la famille de Waly Bâ, directeur de l'école Pikine 3 Poteaux, pour assister au sacrifice du mouton, à son dépeçage... et pour le manger ! L'acte est un rituel symbolique : l'animal doit être égorgé rapidement, après avoir prononcé les paroles religieuses appropriées. Le sacrifice est fait dans chaque maison, en se dirigeant vers l'est, c'est à dire vers la Mecque. Le matin du jour J, les hommes et les garçons vont prier à la mosquée. Ils sont élégants dans leurs tuniques.

On nous raconte l'origine de cette tradition : Dieu demanda à Abraham de sacrifier son fils pour être lavé de ses péchés, et Abraham accepta. Au moment où il allait donner la mort à son fils, Dieu remplaça l'enfant par un mouton. C'est donc pour commémorer cet événement que chaque musulman (en théorie) doit sacrifier un mouton le jour de la Tabaski. Ce sont la plupart du temps les chefs de famille qui le font, au nom de toute la famille dont ils ont la charge. Les femmes peuvent le faire également.

La personne qui n'a pas les moyens de s'acheter un mouton (au moins 40 000 francs CFA, soit 60 euros), peut sacrifier une brebis, ou bien un bouc, une chèvre, un chameau ou en dernier recours, un boeuf. Celui qui ne peut pas acheter une bête (son prix représente un salaire), se joindra à une famille. Le mouton est ensuite dépecé et il sera entièrement mangé durant plusieurs mois, en conservant la viande. La peau pourra être lavée, séchée et utilisée comme tapis de prière. Le spectacle est impressionnant, âmes sensibles, s'abstenir ! Nous avons joué les curieux avec l'appareil photo et la caméra. Ce qui est incontestable, c'est que celui qui sacrifie le fait proprement et avec des gestes précis, appris en regardant ses parents et ses aînés.
En souvenir, nous avons conservé les cornes du mouton... si, si !


     
 

 


Ngam Diarra.


Saint-Louis Teranga.

[] Le spectacle des enfants : Nous sortons à peine de la Tabaski que le spectacle de l'école Pikine est à l'ordre du jour. Les enfants du Club ne seront pas seuls sur scène : un spectacle traditionnel, le faux lion, sera présenté par d'autres enfants de l'école. Il s'agit d'une danse rythmée par des tam-tams avec des déguisements de tigres et de lion.

Lors d'une visite au Centre Culturel Africain, Fabrice fait la connaissance d'un guitariste, Ngam Diarra et de son groupe "Saint-Louis Teranga" en pleine répétition. Sans plus attendre il est invité à venir jouer avec eux le mbalakh (style de musique sénégalais). Et ça fonctionne !! (Il savait bien qu'il avait du sang africain quelque part).

Les musiciens sont un peu surpris de le voir s'adapter à leur façon de jouer et ils joueront ensemble, à plusieurs reprises, les jours suivants. En leur expliquant notre projet, ils lui proposent de venir jouer dans l'école le jour du spectacle des enfants. En retour, Fabrice leur consacrera un petit reportage sur le site et une vidéo de présentation. Nous espérons que c'est le début d'une collaboration musicale.

Faux lion et groupe de musique, avec un tel programme, le spectacle va tourner à la fête. Mais où en sont les préparatifs des comédiens ? Sont-ils prêts ?

On pensait que non, ce n'était pas évident. Notre première erreur a été de placer la date du spectacle près de la Tabaski et durant la Coupe d'Afrique des Nations ! Ce sont les paramètres qui expliquent l'absence de certains enfants du club et l'annulation de plusieurs répétitions.
Notre seconde erreur a été de baisser les bras : le spectacle était annoncé pour le vendredi 6 février et la veille, après 6 jours d'absence, seule la moitié des enfants étaient là. La pièce ne pouvait pas avoir lieu avec notre seule volonté.
On nous a alors fait remarquer que toute l'école attendait l'évènement et que les enfants du club seront très déçus de ne pas montrer se qu'ils avaient appris auprès de nous. La remarque a fait mouche.

 


     
 

 


Les élèves nous aident
à créer la scène.


Bien, alors les gars,
il va falloir s'y mettre.


Vous les reconnaissez ?
Magette et Abdoulaye.

On nous a reproché la rigueur de l'atelier théâtre. Mais là, il ne faut pas tout mélanger : Mireille explique alors qu'improviser demande une bonne compréhension de la pièce (il est dommage d'apprendre aux enfants à chanter ou dire des mots dont ils ignorent le sens) !
Vous rappelez-vous de l'expression wolof : thiat (newsletter n° 9) ? Eh bien, le jour du spectacle, nous avons assisté à un contre-thiat !

Le vendredi matin, nous sommes venus à l'école. Nous sommes passé dans les classes pour appeler chaque enfant. Dans la salle d'informatique, nous leur avons demandé si ils tenaient vraiment à jouer devant leurs camarades.
La réponse fut unanime : OUI !
Bien, alors les gars, il va falloir s'y mettre : on reprend toute la pièce, là, tout de suite, juste en parole et assis sur nos chaises (une italienne) - miracle, ils se souviennent de toutes les répliques contrairement aux dernières répétitions ; Mireille sort alors acheter du maquillage et trouve du carton pour les masques des deux personnages principaux, ensuite Fabrice fait revoir les déplacements sur la scène et l'accompagnement musical (un filage), le directeur invite les enfants à s'exprimer dans la langue de leur choix (français ou wolof)...
Tous les autres enfants sont rentrés déjeuner. L'école est vide. Et, c'est avec décontraction que on leur annonce qu'ils vont devoir revenir une heure avant le tout le monde, habillés en Tchosan (tenue traditionnelle - merci la Tabaski) et qu'ils joueront avec des micros !
Résultat en image :


     
 

Ils l'ont fait : à 15 heures, ils étaient là, joyeux et ils fredonnaient déjà la chanson du début de leur pièce : "Connaissez-vous l'histoire de l'hyène et du lièvre ? Ils vivaient et chassaient tous deux dans la savane..."
Nous sommes très fier d'eux !

 
 


Une pièce, une terrasse, un jardin, le soleil : ce n'est pas facile tous les jours.


Aïssata aime les tartines au chocolat. Etonnant !!


Rencontre insollite et discussion
avec des enfants qui vivent dans la rue, dossier à venir.


Détail de collage de buchettes d'allumettes,
dossier sur Cheikna Djiré, plasticien.

[] Visites, rencontres et reportages : Nous pouvons souffler quelques minutes. Il nous reste une semaine avant de quitter Saint-Louis et c'est en général quand on annonce que l'on doit partir que les rendez-vous tombent. Ca vous fait ça à vous aussi !?
Notre appartement et son jardin calme ne nous verront que très rarement :

Une vraie complicité nous lie aux enfants du Club (15 sur 20 ont pu vivre l'échange pleinement).
Nous les emmenons une après-midi en ballade pour un goûter très fort en chocolat, sodas et contes musicaux. Il paraît que nous allons leur manquer. Mais rien n'est perdu puisque Ousmane, 11 ans, est candidat pour épouser notre fille (quand nous en aurons une) ! Donc on reste en contact...

On garde également le contact avec le directeur, Waly Bâ et on suivra son travail avec l'association de protection des enfants des rues, l'APER. C'est en compagnie de Pape Niang, son associé et de Moussa, un responsable d'une autre association, Claire Enfance, que nous allons rencontrer, un matin, les enfants qui vivent dans la rue. Et ils sont nombreux ! Au Sénégal, seule la moitié des enfants sont scolarisés. L'école est un luxe et avoir le niveau ne suffit pas pour obtenir l'entrée en classe supérieure. Souvent en fugue, utilisés par les commerçants, tentés par la drogue et la prostitution, ces enfants connaissent un autre visage du Sénégal. C'est avec patience, amour et un savoir-faire remarquable que des hommes et des femmes les écoutent, les soignent et les responsabilisent peu à peu.
Nous leur posons des questions : "Que pensez-vous du travail que font ces éducateurs ?", "Quel est votre voeu le plus cher ?"... L'entretien dure deux heures et nous nous sentons à l'école, celle de la vie. Le temps passe vite. Un dossier sur cette rencontre est en cours.

Au Centre Culturel Africain, on ne fait pas que de la musique. Il y a aussi une salle multimédia, une troupe de théâtre, des plasticiens.
Nous faisons un portrait de Cheikna Djiré, un artiste engagé qui nous présente 3 tableaux exposés lors de la 4e édition du festival national des Arts et de la Culture.

 


80 cm de long et 50 de large,
60 ans et 57 Kg !
Quel est ton secret ?


Un oryx. Espèce protégée suite aux ravages du braconnage.

 

[] Le parc national de Guembeul : Situé à 15 Km de Saint-Louis en direction de Dakar, s'étend le parc naturel de Guembeul. Il s'étend sur 700 hectares et est bordé par 14 Km de grillage. Le parc à pour vocation de préserver la faune et la flore naturels ainsi que des espèces menacées (gazelles, oryx).
Il est nettement plus petit que le parc de Djouj qui fait 80 000 hectares mais reçoit cependant les mêmes espèces d'oiseaux migrateurs durant la période hivernale.

Nous décidons un matin de nous y rendre. Nous louons les services d'un guide et nous nous enfonçons dans la réserve. Dès les premiers mètres, nous découvrons une famille de tortues géantes que les gardiens tiennent visibles pour les visiteurs car toutes les autres sont en train d'hiberner dans le sable.
Plus loin, un oryx solitaire. Vaincu par un autre mâle, il se tient à l'écart du troupeau. Ses magnifiques cornes ont failli coûter l'extinction de son espèce.

Nous apercevrons de très loin quelques gazelles, plus farouches et d'encore plus loin quelques pélicans se reposant sur le grand lac du parc avant de rentrer, un peu déçus et les pieds couverts de vase ! Mais nous avons appris des choses intéressantes et renoué avec la nature et la marche.


     
 


Mimi est une grande fille maintenant, puisqu'elle a eu ses 29 ans mardi dernier !
(mais elle fait déjà 57 Kg,
qu'est-ce que ce sera à 60 ans !?)

Nous avons encore envie de grands espaces. Alors, après avoir dit au revoir aux Saint-Louisiens, nous irons quelques jours dans un campement vers le lac rose (tout rose) près de Dakar. Ensuite, la capitale et l'avion pour la France...

La prochaine news, clôturera donc notre séjour en Afrique. Nous en profitons pour dire aux Sénégalais que nous souhaitions que les Lions gagnent la Coupe d'Afrique des Nations. La prochaine sera la bonne ! A très bientôt et portez-vous bien.
Fabrice et Mimi

 

Visitez l'album photo du Sénégal et lisez la suite de nos aventures dans le prochain carnet de voyage : "De Saint Louis à Paris".